Comment Nice devient Savoyarde
Sans enfant, en dépit de quatre mariages, Jeanne 1e, reine de Naples, comtesse de Provence, désigne en 1380 Charles de Duras pour lui succéder. A la suite d'une brouille, elle change d'avis et nomme Louis d'Anjou, fils du roi de France Jean-le-Bon comme héritier. Furieux, Duras envahit Naples, capture et emprisonne la reine.
Quand, en 1382, Louis d'Anjou peut entreprendre une expédition sur Naples, la reine est exécutée. Dans cette entreprise, Louis d'Anjou était assisté du comte de Savoie Amédée VII. Pour le dédommager, il lui accordait des droits sur le Piémont méridional et la promesse d'une somme substantielle. Tandis que la guerre civile ravage la Provence, les deux prétendants meurent, laissant deux jeunes héritiers régentés par leur mère et soutenus par deux papes rivaux, celui d'Avignon et celui de Rome. Mettant cette situation à profit, Jean Grimaldi, nommé en 1387 Sénéchal de Provence par les Duras, choisit un protecteur en la personne d'Amédée VII et place, le 2 avril 1388, tous ses fiefs sous la suzeraineté du comte. Une convention est signée à Chambéry le 2 août.
Elle prévoit la cession des vigueries de Nice, Puget-Théniers, Val-de-Lantosque et de la baillie de Barcelonnette. Aussitôt, Amédée, traversant le Piémont, atteint Barcelonnette le 12 septembre, Saint-Etienne le 15, passe à Saint-Martin-Vésubie, évitant Saint-Sauveur et le Valdeblore, acquis aux Anjou, arrive devant Nice le 27. Siégeant à l'abbaye de Saint-Pons, il reçoit, le 28 septembre 1388, la Dédition de Nice par l'entremise de ses syndics, puis pénètre en ville et s'installe au château où les communautés viennent lui rendre hommage.
Les Grimaldi visaient, dans un second temps, l'indépendance à leur profit de la région niçoise. Mais Amédée VII, vicaire du Saint-Empire, agissant au nom de Ladislas de Duras, légitime héritier, allait faire officialiser sa conquête. D'ailleurs, celle-ci devait lui revenir si, dans un délai de trois ans, Ladislas n'avait pu en rembourser les frais. C'est ce qui advint.
Le 12 novembre 1391, les communautés du futur Comté de Nice prêtent allégeance définitive à Amédée VII. La maison d'Anjou revendiqua ces terres perdues énergiquement pendant trente ans. Amédée VIII fit jouer la créance contractée par Louis Ier lors de son expédition italienne. Le 5 octobre 1419, la reine Yolande, veuve de Louis II, abandonne tous ses droits sur les terres tenues par Amédée VIII en extinction de cette dette évaluée à 165 000 florins d'or. La maison de Savoie entérinait l'acquisition de ses "Terres Neuves de Provence" sur lesquelles elle devait régner 472 ans et ce malgré les revendications réitérées de François Ier et de Louis XIV.